Les femmes sont les premières victimes du syndrome de l’imposteur au travail. Il touche silencieusement des millions de professionnelles, quel que soit leur niveau de compétence.
Dès les premières responsabilités ou promotions, une voix intérieure insidieuse peut surgir : « Et si je ne méritais pas ma place ? »
Ce doute constant, injustifié, se manifeste souvent chez des individus pourtant brillantes, investies et compétentes.
Comprendre les racines de ce syndrome, ses effets sur la santé mentale et son impact professionnel est essentiel pour en sortir durablement.
Aux origines du syndrome de l’imposteur : un concept qui évolue
Le terme « impostor phenomenon » est introduit pour la première fois en 1978 par les psychologues américaines Pauline Clance et Suzanne Imes. Leur étude portait sur des femmes diplômées, reconnues pour leurs réussites académiques et professionnelles, mais qui avaient en commun un profond sentiment de fraude intellectuelle.
Progressivement, ce phénomène s’est révélé universel. Des chercheurs comme Valerie Young, autrice du livre « Ces femmes qui réussissent sans y croire« , ont démontré que le syndrome de l’imposteur ne se limite ni à un sexe ni à un statut. Il peut toucher autant les cadres supérieurs que les étudiants, les artistes que les entrepreneurs.
Cependant, les femmes en entreprise continuent d’être surreprésentées parmi les profils à risque, en raison de normes sociales, de biais genrés et d’une éducation encore marquée par la modestie et la peur de déplaire.
Aujourd’hui, le syndrome de l’imposteur est reconnu comme un enjeu de santé psychologique au travail, bien qu’il ne figure pas dans les classifications médicales officielles. Il n’en reste pas moins un facteur de mal-être et de blocage professionnel important.
Un lien étroit avec la santé mentale
Il ne s’agit pas simplement d’un manque de confiance en soi. Le syndrome de l’imposteur au travail entretient des liens profonds avec l’anxiété, la dépression et l’épuisement émotionnel. Comme le montre une revue systématique de Bravata et al. (2020), publiée dans le Journal of General Internal Medicine, les personnes souffrant de ce syndrome présentent des niveaux élevés de détresse psychologique et d’anxiété généralisée.
En entreprise, le climat de performance, les évaluations permanentes et la peur de l’échec sont autant de déclencheurs. Le perfectionnisme joue ici un rôle central : vouloir faire toujours mieux, pour prouver sa valeur, finit par épuiser. Les erreurs deviennent insupportables et vécues comme des preuves d’incompétence.
Chez les femmes, ces mécanismes sont amplifiés par une pression sociale particulière. Trop assertive ? On les perçoit comme autoritaires. Trop discrète ? On les juge peu ambitieuses. Cette double contrainte engendre une vigilance permanente, source de stress chronique.
Par ailleurs, les réseaux sociaux ajoutent une dimension nouvelle. La comparaison constante avec les autres, le succès mis en scène, les « parcours parfaits » visibles en ligne renforcent l’illusion d’être toujours en décalage. Peu à peu, le doute s’installe, mine l’estime de soi, et génère des comportements d’évitement ou de surinvestissement.
Le cycle du syndrome de l’imposteur : une spirale auto-entretenue
Le syndrome de l’imposteur fonctionne comme une boucle mentale, dans laquelle chaque succès renforce paradoxalement le doute.
Lorsqu’une nouvelle mission ou un défi professionnel survient, l’anxiété s’installe. En réaction, la personne se lance dans un surinvestissement intense ou, au contraire, dans une procrastination anxieuse.
Lorsque la mission est menée à bien, souvent avec brio, les retours positifs génèrent un soulagement temporaire. Pourtant, au lieu d’intégrer ce succès comme une preuve de compétence, la personne l’attribue à la chance, à l’aide des autres, ou à un effort démesuré.
Ainsi, l’estime de soi ne se renforce pas. Le doute persiste, prêt à ressurgir au prochain défi. Ce cycle est redoutable car il empêche l’apprentissage par l’expérience. Même les compliments reçus sont perçus comme suspects.
Chez les femmes, ce processus est souvent amplifié par un contexte professionnel plus exigeant. Lorsqu’elles évoluent dans des secteurs dominés par les hommes, elles doivent sans cesse prouver leur légitimité. Le danger réside alors dans la fatigue émotionnelle, le sentiment de solitude, et parfois une véritable crise identitaire professionnelle.
Les effets du syndrome de l’imposteur au travail
Sur le terrain, les conséquences sont nombreuses et rarement visibles. Les personnes touchées prennent moins la parole en réunion, évitent les promotions ou les projets à haute visibilité, minimisent leurs succès, et laissent passer des opportunités de développement.
Certaines deviennent invisibles à force de discrétion. D’autres s’épuisent à force de vouloir tout prouver. Dans tous les cas, les feedbacks positifs ne suffisent plus, car l’auto-critique domine.
Pour les entreprises, ce syndrome a un coût silencieux : démotivation, désengagement, frein à l’innovation, sous-représentation féminine dans les postes à responsabilité. Les talents s’auto-limitent, au lieu de s’épanouir. Comme le montrent Cadoche et de Montarlot dans Le syndrome de l’imposteur, ce phénomène peut affecter durablement des carrières entières, en particulier celles des femmes brillantes, mais bridées par leurs propres croyances limitantes.
Interconnexions : racines, santé mentale, cycle et impact
Derriere les symptômes visibles, le syndrome de l’imposteur repose sur un enchevêtrement de causes et de conséquences. En effet, les croyances limitantes issues de l’enfance ou des premières expériences professionnelles alimentent des réactions anxieuses au travail.
Ensuite, l’anxiété provoque des stratégies d’adaptation peu efficaces, comme le surinvestissement ou l’évitement. Ainsi, chaque nouveau défi renforce les peurs, prolonge le cycle, et fragilise la santé mentale.
Par conséquent, l’impact professionnel devient inévitable : les performances stagnent, les initiatives se raréfient, et la motivation s’effrite. Malheureusement, ces blocages renforcent encore la croyance de ne pas être à la hauteur. De fil en aiguille, un cercle vicieux s’installe. Or, sans accompagnement ciblé, il est très difficile d’en sortir durablement.
Vers une sortie durable : pistes de transformation
Pour briser ce cycle, plusieurs leviers existent. Tout d’abord, il est essentiel d’apprendre à reconnaître ses succès, non comme des exceptions, mais comme des résultats mérités.
Ensuite, travailler sur ses schémas de pensée permet d’identifier les distorsions cognitives responsables du doute permanent. De plus, renforcer l’auto-compassion aide à se libérer du perfectionnisme paralysant. Progressivement, les petites victoires peuvent nourrir une confiance plus stable.
Toutefois, ce travail introspectif n’est pas toujours évident seul. C’est pourquoi l’accompagnement par un professionnel comme un sophrologue peut être déterminant. En effet, la sophrologie offre des outils concrets pour gérer le stress, développer la conscience de soi et retrouver un équilibre entre exigence et bienveillance. Ainsi, pas à pas, chacun peut réinvestir sa légitimité et affirmer sa place avec sérénité.
Et si vous passiez à l’action ?
Le syndrome de l’imposteur au travail ne définit pas qui vous êtes. Il reflète surtout une sensibilité forte, une volonté de bien faire, et une conscience aiguë de vos responsabilités.
Pourtant, ces qualités deviennent des freins lorsqu’elles sont déformées par le doute. Aujourd’hui, vous avez le droit de croire en vos compétences. Vous avez le droit de vous sentir à votre place. Vous avez aussi le droit de demander de l’aide.
Alors, pourquoi ne pas commencer maintenant ? Prenez rendez-vous avec votre sophrologue, osez en parler autour de vous, et faites le premier pas vers plus de confiance. Vous n’êtes pas seule. Et vous êtes pleinement légitime.
Bibliographie
- Cadoche, E. & de Montarlot, A. (2020). Le syndrome de l’imposteur. Éditions Eyrolles. Voir sur Amazon
- Young, V. (2011). Ces femmes qui réussissent sans y croire. Éditions Leduc.s. Voir sur Amazon
- Bravata, D.M., et al. (2020). “Prevalence, predictors, and treatment of impostor syndrome: a systematic review”, Journal of General Internal Medicine.
- Neff, K. (2013). L’autocompassion. Belfond. Voir sur Amazon
- Servan-Schreiber, F. (2016). S’épanouir au travail. Marabout. Voir sur Amazon
Laisser un commentaire