l'oisiveté - ennui - créativitéL’oisiveté, qu’il ne faut pas confondre avec l’ennui, la paresse ou la procrastination, a bien mauvaise presse.

Dans une société où passer sa vie à courir d’une occupation à l’autre et où un agenda plein à craquer est considéré comme signe de réussite sociale, l’oisiveté est considérée comme une aberration.

Pourtant, cette vision fabriquée de toute pièce par une société d’hyperconsommation oublie quelques bases essentielles.

En premier lieu, je vous propose donc de faire un point sur ces différents concepts que sont l’oisiveté, l’ennui et la paresse.

Ensuite, nous découvrirons ces 3 raisons qui doivent nous inciter à envisager différemment l’oisiveté. Finalement, nous verrons comment, grâce à la sophrologie ou la méditation de pleine conscience, apprivoiser cet état et retrouver le moyen d’en tirer avantage.

L’oisiveté, l’ennui, la paresse…

D’abord, commençons par quelques définitions tirées de l’excellent site du CNRS :

  • Oisiveté : état d’une personne qui ne fait rien, momentanément ou de façon durable, qui n’a pas d’occupation précise.
  • Ennui : sentiment de lassitude coïncidant avec une impression plus ou moins profonde de vide, d’inutilité qui ronge l’âme sans cause précise ou qui est inspiré par des considérations de caractère métaphysique ou moral.
  • Paresse : propension à ne rien faire, répugnance au travail, à l’effort physique ou intellectuel; faiblesse de caractère qui porte à l’inaction.
  • Procrastination : je vous renvoi à l’article qui traite de ce sujet pour en retrouver le définition et les moyens de la vaincre.

Que pouvons-nous en tirer ? À première vue, on pourrait en déduire que l’oisiveté n’est rien d’autre que la conséquence de l’ennui ou de la paresse. En effet, celui qui s’ennuie ou paresse ne fait rien. Mais, une fois de plus, ce serait un peu trop facile.

L’oisiveté comme valeur

Cette vision de l’oisiveté « mauvaise », du vice, est très contemporaine. Dans l’antiquité, elle était associée à l’otium.

« C’est le temps durant lequel une personne profite du repos pour s’adonner à la méditation, au loisir studieux.

[…] C’est un temps, sporadique ou prolongé, de loisir personnel aux implications intellectuelles, vertueuses ou morales avec l’idée d’éloignement du quotidien […] valorisant le développement artistique ou intellectuel (éloquence, écriture, philosophie).

Sénèque loue les mérites de l’otium et le considère comme la caractéristique de l’homme vraiment libre, mais en ajoutant qu’il est bon de le consacrer à un rôle social ou politique dans la cité. » (Source Wikipédia)

La bible elle-même encourage à l’oisiveté :

« C’est pourquoi je vous dis : ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus. La vie n’est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ? Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne moissonnent, et ils n’amassent rien dans des greniers ; et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? » – Matthieu 6:26

Dans ces conditions, pourquoi est-elle devenue un vice ? Qu’est-ce qui a changé ?

L’oisiveté comme un vice

C’est avec l’avènement de l’industrie que l’oisiveté devient un vice. Il faut produire plus, l’otium est réservé aux aristocrates.

L’extrait suivant pose les bases de ce que sera la vision moderne. Il se passe de commentaire :

« En faisant l’éloge du travail, nous avons fait la satire de la fainéantise et de l’oisiveté. Nous avons condamné ce qu’il y a de plus vil au monde, c’est-à-dire cet homme paresseux sans courage et sans honneur qui veut manger un pain qu’il n’a pas gagné, recueillir ce qu’il n’a pas semé, un lâche qui se croise les bras tandis que les autres suent et travaillent du matin au soir, qui ne fait rien pour la société et qui veut que la société le nourrisse (…) L’oisiveté la mère de tous les vices, conduit à l’opprobre et à l’échafaud; elle engendre la misère et la maladie pour quelques jouissances passagères(…), pour un repos honteux qui lasse et qui avilit(…) »

Le livre de l’ouvrier: ses devoirs envers la société, la famille et lui-même, Adrien Egron 1844

3 bonnes raisons d’être oisif

Cette vision moderne et productiviste oublie pourtant une chose essentielle : elle doit beaucoup à l’oisiveté. En effet, il ne me semble pas qu’Archimède ait été particulièrement actif dans son bain quand il a découvert le principe physique qui porte son nom. Principe essentiel à de nombreuses activités industrielles et au transport.

De même, Newton n’était pas particulièrement affairé sous son arbre quand il a vu tomber la pomme. C’est pourtant la source d’un principe qui a révolutionné la physique.

L’oisiveté crée un vide, un espace propice à la réflexion, au questionnement et à la créativité. C’est de cet espace que sont issues les 3 bonnes raisons pour lesquelles il faut savoir être oisif :

1 : l’oisiveté est un temps de création du bonheur

Effectivement, temporairement dégagée des contingences de l’instant et des obligations sociales, l’oisiveté est un temps de réflexion. Un temps de réflexion sur soi, sur ce que l’on voudrait être, sur ce que l’on est. Quel meilleur moment pour réfléchir à ses valeurs ?

Par ailleurs, c’est aussi le moment de réfléchir à comment y accéder… ou de se rendre compte que le bonheur est là, à portée de main. Que nous passons souvent à côté tellement il nous paraît simple.

2: C’est un temps de créativité

Qui n’a jamais rencontré cette situation où, en dépit d’efforts et d’heures passées, il est impossible de trouver une solution à un problème donné ? Vous finissez par abandonner. Vous passez totalement à autre chose, vous relâchez votre esprit… et soudain, au retour du week-end ou d’une simple ballade, la solution apparaît. Claire et limpide !

Aussi, souvenez-vous d’Archimède et de Newton. Nous ne sommes jamais aussi créatifs qu’une fois libérés des contraintes.

3: La prise de conscience de soi

En effet, à quel autre moment pouvez-vous prendre conscience de votre corps ? De même, y a-t-il un moment plus approprié que cette parenthèse pour écouter son corps, entendre son souffle et se souvenir que l’on existe ? C’est le moment idéal pour se retrouver et réapprendre à s’aimer.

Pour ces raisons, et bien d’autres que chacun découvrira sur son parcours, l’oisiveté ne doit plus être considérée exclusivement comme un vice. Elle ne le devient que quand elle occupe toute la place et nous ramène alors à l’ennui ou la paresse.

Apprendre l’oisiveté

Ainsi, il faut apprendre à se ménager des pauses, des espaces d’oisiveté. À se créer une routine. Toutefois, ceci n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît.

D’abord il nous faut combattre des années d’image et d’archétypes négatifs. Ce sont eux qui sont à l’origine de ce sentiment de malaise qui naît en nous à chaque période d’inactivité.

Pour adopter le vocabulaire scientifique, l’oisiveté est un espace de non-faire qui, en raison de la pression sociale et de ces archétypes, crée une sensation de non-être.

Bref, dans une société où il faut faire pour être et où l’on comble tous les espaces par le téléphone et les réseaux sociaux, ne rien faire nous donne l’impression de ne plus être, de ne plus exister.

Dans ces conditions, que ce soit à l’aide de la sophrologie ou de la méditation de pleine conscience, il nous faut apprendre à lâcher prise. À nous libérer de ces messages contraignants, à reprendre confiance en soi.

Par exemple, combien d’entre vous sont en mesure de s’asseoir sans rien faire ? De regarder simplement les aiguilles de l’horloge tourner pendant 5 minutes sans éprouver un malaise ni le besoin de bouger ? C’est pourtant le meilleur exercice pour apprendre.

Les 6, 7 et 8 février derniers étaient les journées sans portable. Rares sont ceux qui arrivent à s’en passer une journée entière, alors imaginez la préparation pour tenir 3 jours ! C’est pourtant mon objectif.

Et je vous invite à en faire de même. Apprenez à lutter contre ce faux malaise, à dépasser ce conditionnement et à retrouver ce moment où, l’esprit libre, vous revenez à vous même, à vos valeurs et retrouvez la créativité.