détresse et fatigue au travailLa détresse et l’épuisement professionnel ne se résument pas uniquement par le terme de burn-out.

À trop utiliser ce mot, moi la première, on finit par en oublier d’autres formes d’expression de la détresse que peuvent rencontrer certains de nos contemporains vis-à-vis de leur situation professionnelle, et l’épuisement que cela provoque.

Pour comprendre cette détresse et mieux saisir cet épuisement professionnel, je vous parlerai donc de ceux qui se lancent à corps perdu dans le travail (le workaholisme) et de ceux qui sombrent dans la dépression.

Mais aussi et parce que c’est malheureusement d’actualité, du stress post-traumatique ou de la fatigue compassionnelle dont souffrent certaines professions particulières comme les policiers, pompiers, urgentistes, infirmières…

S’il n’y avait que le burn-out…

Selon une étude réalisée en 2014 par un cabinet privé, le burn-out ne touche “que” 5% à 10% de la population. Tous ceux qui en souffrent voudront bien me pardonner mais, s’il n’y avait “que” le burn-out, les choses seraient si simples.

Ce chiffre a naturellement été utilisé pour nous démontrer que 90% à 95% des Français sont donc heureux dans leur travail ! Cette lapalissade aurait pu prêter à sourire si elle n’était pas l’arbre qui cache la forêt.

Pour commencer, il faut relire cette étude pour se rendre compte que l’épuisement professionnel ne touche pas l’ensemble des travailleurs de façon uniforme.

En fonction des secteurs d’activités, il touche entre 5% et 20% des travailleurs, mais peut atteindre jusqu’à 50% dans le domaine de la santé et des soins. De 10% à 50%, il n’y a, il est vrai, qu’un facteur 5… ce qui est énorme !

Contrairement à ce que nous pourrions penser, burn-out ne rime pas toujours avec dépression. Certaines personnes en burn-out retrouvent un intérêt et même une certaine productivité dans des domaines autres que ceux liés à l’activité professionnelle. À l’opposé, la détresse et l’épuisement professionnel peuvent amener à la dépression.

Si le burnout reste, dans la plupart du temps, centré sur le domaine professionnel, la dépression est invasive. Elle s’attaque à l’ensemble de secteurs de la vie, y compris la sphère personnelle. Là où la personne en burn-out retrouve de l’intérêt, le sujet dont la détresse se traduit par une dépression, perds tout intérêt à la vie privée ou aux loisirs.

À ce jour, aucune étude ne permet d’estimer de façon précise ce phénomène, mais il vient s’ajouter, de façon insidieuse, à celui du burn-out.

D’autres formes de détresse et d’épuisement.

Si le burn-out et la dépression sont les deux manifestations les plus courantes, il ne faut pas oublier qu’il existe également d’autres façons d’exprimer sa détresse au travail. Le workaholisme est certainement la plus pernicieuse d’entre elles.

Le workaholisme se caractérise par 3 dimensions bien identifiées (Spencer et Robbins 1992) :

  1. L’implication dans le travail: le workaholique aime ce qu’il fait et donne le meilleur de soi;
  2. La compulsion : elle correspond au fait qu’il se sent obligé, par une pression intérieure, de travailler dur;
  3. La satisfaction du travail accompli : seul le fait d’avoir travaillé dur et beaucoup plus lui donne, si ce n’est de la satisfaction, au moins la paix de l’esprit.

Mais le workaholisme cache souvent une détresse immense. Cette hyperactivité intellectuelle et physique n’est souvent qu’un moyen de s’épuiser pour éviter de penser (Szwec, 1998). Faute de pouvoir faire face à sa détresse, le sujet la fuit.

Ce tour d’horizon ne serait pas complet si nous n’abordions pas les cas du stress post-traumatique et de la fatigue compassionnelle.

Le stress post-traumatique est souvent associé aux victimes. Pourtant, il touche également de plein fouet et avec les mêmes symptômes, toutes les professions qui interviennent auprès de ces victimes : policiers, pompiers, urgentistes, témoins…

Chez chacun d’entre eux, la détresse et la difficulté à réaliser, assimiler et surmonter cet événement traumatique peuvent provoquer les mêmes symptômes que ceux subis par les victimes elles-mêmes : flash-back, cauchemars, phobies, hypervigilance…

Dans un domaine assez similaire, nous retrouvons la fatigue compassionnelle. Cet épuisement psychologique touche plus particulièrement les soignants, les aidants ou plus généralement les professionnels de la relation d’aide.

Confrontées à la souffrance de l’autre, rattrapé par la contagion émotionnelle et la sollicitude, ces personnes peuvent développer un sentiment d’abandon, d’impuissance, qui s’accompagne d’une sensation de détresse et d’isolement. Contrairement au burnout, la fatigue compassionnelle ne prévient pas, il n’y a aucun signe.

De plus, c’est leur vision du monde et leurs croyances qui sont durablement modifiées avec une très nette érosion de l’empathie, de l’optimisme et de la compassion, ce qui n’est pas sans effet sur leur implication professionnelle.

Le workaholisme comme la détresse compassionnelle sont très difficiles à détecter, car ils se confondent souvent avec un investissement personnel et répondent (ou dépassent) souvent les attentes de l’encadrement… pour leur plus grande satisfaction.

Prévenir et accompagner.

Une fois encore, ce n’est pas moi qui chercherai à vous expliquer que la sophrologie, la méditation ou toute autre technique est susceptible de répondre à tous ces maux.

Par contre, que ce soit au niveau primaire – c’est à dire dans la recherche pour éviter que ces détresses ne surviennent en agissant sur les causes intrinsèques – , secondaire (dans lequel on cherche à minimiser le nombre de personnes touchées) ou dans la prise en charge des personnes atteintes, il existe toujours une approche individuelle du problème.

C’est au sein de cette approche individuelle qu’il faut donner à chacun la possibilité de développer des stratégies d’évitement et de distanciation.

Il faut permettre, au travers de la sophrologie, de la méditation ou d’autres techniques similaires, l’acquisition d’une meilleure connaissance de soi même, de ses limites, et des techniques pour les préserver avant de se laisser entraîner dans la spirale du burn-out ou de la détresse professionnelle.

Bibliographie :

Spence and Robbins 1992 – Workaholism: definition, measurement, and preliminary results.

Gérard Szwec, 1998 – Les galériens volontaires

Philippe Zawieja, 2015 – Le burn-out